réacteur EPR
Le turbo-alternateur de la centrale nucléaire de Flamanville, le 25 avril 2024 dans La Manche ( AFP / Lou BENOIST )
Dernier jour de l’automne ou premier jour de l’hiver: le jour J est arrivé pour l’EPR de Flamanville. Avec 12 ans de retard, le réacteur nucléaire de nouvelle génération devrait être raccordé dans la nuit au réseau et contribuer à la production électrique de la France, avec un timing serré.
Prévu initialement à 10H00, repoussé une première fois à 20H00, EDF a finalement fait état d’une opération de maintenance du réacteur devant se terminer à 23H00, impliquant un couplage juste avant le seuil de la fin de l’automne sur lequel s’était engagé EDF en septembre.
“Depuis hier et cette nuit notamment, certaines opérations ont amené à reprendre un peu de marge et à décaler dans la journée”, mais “aujourd’hui, c’est cette heure-là qui est la plus probable”, a indiqué Régis Clément, directeur adjoint de la division Production nucléaire chez EDF lors d’un point presse vendredi après-midi. Il n’excluait pas totalement un couplage un peu plus tard dans la nuit.
Des employés d’EDF en face d’une coupole de la centrale nucléaire de Flamanville dans la Manche, le 25 avril 2024 ( AFP / Lou BENOIST )
L’opération doit se faire à très basse charge, ayant atteint un niveau “d’environ 20%” de sa puissance, a-t-il précisé. Ce qui permettra de vérifier que “tout va bien” avant d’enchaîner “les essais supplémentaires”.
“Entre 10 et 15 arrêts et redémarrages sont programmés” ensuite pour tester le réacteur, qui parviendra à 100% de puissance “à l’été 2025”, lors de son premier cycle d’activité industrielle de 18 mois, a-t-il indiqué.
Ensuite, probablement au printemps 2026, aura lieu un premier arrêt programmé pour maintenance et rechargement du combustible appelé Visite Complète 1″, selon EDF.
La journée de vendredi marque un aboutissement pour ce chantier qui accuse 12 ans de retard sur le calendrier initial en raison de nombreux déboires techniques. Ceux-ci ont fait exploser les délais et la facture, désormais estimée à 13,2 milliards d’euros par EDF, soit quatre fois le devis initial de 3,3 milliards.
En 2020, la Cour des Comptes l’avait évaluée à 19 milliards, en incluant les “surcoûts de financement”.
Paradoxalement, l’arrivée sur le réseau de ce réacteur de plus de 1.600 MW, le plus puissant du parc français, intervient alors que la consommation d’électricité du pays est en retrait par rapport aux années d’avant Covid-19, de l’ordre de 6%.
“L’électricité est disponible, utilisons-la”, a lancé comme un cri du coeur le PDG d’EDF, Luc Rémont la semaine dernière, sur fond de crise dans l’industrie notamment automobile, et de coup d’arrêt de l’électrification des usages.
– Premier nouveau réacteur depuis 1999 –
Cela faisait un quart de siècle que la France, pays qui compte le plus de centrales nucléaires par habitant, n’avait pas fait démarrer un nouveau réacteur, depuis 1999 avec le réacteur nucléaire 2 de Civaux, dans la Vienne.
Outre la complexité du chantier, la longue pause dans la construction de nouveaux réacteurs en France est pointée du doigt par les experts, pour qui elle a engendré une perte de compétences dans la filière, expliquant en partie les déboires rencontrés sur ce chantier colossal.
Emmanuel Macron devant une turbine nucléaire Arabelle dans les ateliers GE à Belfort, repris depuis par EDF, le jour de l’annonce de la relance du nucléaire civil en France, le 10 février 2022 ( POOL / Jean-Francois Badias )
Et pour la suite?
Emmanuel Macron a décidé de relancer le nucléaire civil en France, en commandant six réacteurs EPR2 (et huit supplémentaires en option) à l’énergéticien, mais le cadre budgétaire se fait attendre pour ce chantier d’autant plus pharaonique qu’EDF, détenu à 100% par l’Etat, est lourdement endetté.
Le manque de visibilité politique n’arrange pas les choses, à en croire le journal Les Echos. Il affirme que, selon plusieurs sources, le conseil d’administration de l’énergéticien a voté mercredi, dans le budget 2025, une baisse de l’enveloppe dédiée aux travaux préparatoires des futurs EPR2, de 2 milliards d’euros à une fourchette de 1,1 à 1,3 milliard d’euros.
Une information qu’a confirmée à l’AFP une source interne à EDF, mais que réfute la direction.
La piscine de l’EPR de Flamanville, avant le début du chargement du combustible, le 25 avril 2024 dans La Manche ( AFP / Lou BENOIST )
L’entreprise affirme que le montant des investissements n’est à ce stade “pas décidé” et qu’il “sera examiné plus tard”, une fois que seront définies l’ensemble des modalités du programme.
Le démarrage du réacteur, initié le 3 septembre, a marqué le début de sa montée en puissance, qui permettra de le connecter au réseau électrique.
L’EPR, un réacteur à eau pressurisée de nouvelle génération, est le 4e de ce type installé dans le monde (deux en Chine, un en Finlande, et un en construction au Royaume-Uni), et le 57e du parc nucléaire français. A terme, il doit alimenter en électricité environ deux millions de foyers.
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